TÉLÉCOMMUNICATIONS - La révolution numérique

TÉLÉCOMMUNICATIONS - La révolution numérique
TÉLÉCOMMUNICATIONS - La révolution numérique

En France, à partir de 1970, la technique dite numérique a été introduite dans les centraux téléphoniques et les systèmes de transmission sur câbles puis sur faisceaux hertziens (liaisons radioélectriques à très hautes fréquences) pour remplacer progressivement la technique analogique. Dans cette nouvelle technique, le signal à transmettre est d’abord converti en une succession de nombres binaires (composés de 0 et de 1) qui représentent les variations d’amplitude du signal dans le temps (en fractions de volts, par exemple). Ces nombres sont à leur tour symbolisés par des signaux électriques à nombre fini d’états possibles (bits), qui s’enchaînent suffisamment rapidement (8 000 nombres par seconde dans le cas de la liaison téléphonique) pour permettre une reconstitution satisfaisante (décodage) à l’extrémité réceptrice.

Les signaux ainsi transmis par ce système sont beaucoup plus résistants aux dégradations éventuelles provenant des bruits de circuit, des parasites électriques, des distorsions de non-linéarité ou des variations de l’affaiblissement en fonction de la fréquence. En pratique, les imperfections de transmission se traduisent par un taux d’erreurs généralement très faible sur les éléments binaires. Les signaux téléphoniques sont alors restitués sans dégradation notable, le délai de propagation demeurant le seul inconvénient éventuel. L’avantage provient aussi de ce qu’il devient possible de tirer le meilleur parti des ressources de la microélectronique dans les équipements.

Le Réseau numérique à intégration de services (R.N.I.S. de France Télécom), appelé depuis 1987 réseau Numéris, est à la fois un prolongement du réseau téléphonique commuté public et une amélioration de sa nature et de l’étendue de ses services. Ses concepts, son architecture fonctionnelle ainsi que ses caractéristiques techniques ont fait l’objet d’une concertation internationale, notamment en Europe, afin d’assurer la meilleure cohérence possible dans le but de constituer un réseau mondial.

Avant l’existence du R.N.I.S. et sauf exceptions, la méthode numérique était uniquement réservée aux centraux téléphoniques appelés commutateurs et à leurs interconnexions. La proportion d’équipements numériques en France (tant en ce qui concerne les commutations interurbaines et locales que les circuits de transmission pour les liaisons interurbaines et locales), supérieure à 50 p. 100 avant 1985, dépassait 80 p. 100 en 1990 et a presque atteint 100 p. 100 peu après 1995. Les commutateurs privés existant dans le milieu professionnel ont également bénéficié de cette numérisation.

Les deux dernières décennies du XXe siècle ont donc été marquées par un bouleversement profond de l’ensemble des moyens de communiquer à distance, dont il n’est pas inutile de rappeler les principales étapes, avant de présenter la nouvelle panoplie des services qui sont offerts à l’utilisateur, privé ou professionnel, et d’anticiper quelques évolutions vraisemblables.

1. Rappel historique

En 1980, la France, qui avait, en ce qui concerne les équipements téléphoniques, presque rattrapé son retard sur les autres pays industriels, avait su prendre une avance technologique en matière de réseaux: les centraux téléphoniques neufs étaient tous à commutation électronique, les circuits de transmission étaient en voie d’être pour la plupart réalisés selon les techniques numériques, plus propices à la miniaturisation et à une protection des signaux à l’égard des dégradations jusqu’alors inévitables: bruit de fond, diaphonie, distorsions, limitations de la bande de fréquences transmises, échos, etc.

Pour l’«abonné au téléphone», catégorie fortement majoritaire d’utilisateurs des moyens de télécommunication, les bénéfices sont sensibles: la qualité du service s’améliore et, surtout, sa disponibilité n’est plus aléatoire.

Le réseau Transpac (réseau à commutation de paquets de données, en d’autres termes le «téléphone des ordinateurs»), réalisation d’avant-garde, est lancé, mais encore peu développé. Le réseau et le service télex de transmission de données alphanumériques à basse vitesse sont largement utilisés dans l’activité économique, notamment pour les échanges internationaux. Le télécopieur, ou fax, qui vient d’être inventé, est cependant encore inconnu du public, d’autant que le prix des premières machines est élevé et que leur fiabilité est médiocre. Le Minitel sort des laboratoires et n’a pas même abordé sa phase critique d’«accouchement sociologique»: la controverse avec les autres médias, en premier lieu avec la presse.

On est encore en pleine phase technologique, dont l’apogée sera marqué par le lancement de satellites français de télécommunication (Télécom-1A et Télécom-1B sont mis sur orbite en août 1984 et en mai 1985, respectivement) et la gestation d’un vaste projet global, dans ses intentions au moins: le Réseau numérique à intégration de services (R.N.I.S.); en témoigne notamment un ouvrage collectif réalisé alors par la Direction générale des télécommunications du ministère des P.T.T., Les Télécommunications françaises (1982), consacré aux télécommunications, où les propos traitant d’autres services que le téléphone représentent moins de 4 p. 100 du total des pages! Dans les autres pays industriels, l’évolution est comparable, voire un peu plus lente, mis à part les satellites et le radiotéléphone, plus rapidement apparu et, surtout, diffusé dans les pays nordiques et anglo-saxons.

Alors que la technologie est en évolution constante, les années 1980 vont connaître une série de mutations d’importance:

– diversification des modes de télécommunication possibles, étant entendu que l’on donne au vocable «télécommunication» le sens d’une transmission (quasi) immédiate du message de l’émetteur vers le destinataire, avec ou sans mise en relation «conversationnelle», et sans transport physique (de type postal, par exemple) du support matériel du message en question;

– émergence des réseaux multiservices;

– apparition et spécialisation des moyens de télécommunication à l’usage des professionnels (entreprises, organisations de toute sorte);

– mondialisation des possibilités offertes.

Ces mutations, alliées à une interpénétration progressive avec le monde de l’informatique et à un abaissement constant des coûts d’usage induit par les progrès technologiques, ont façonné un domaine désormais très diversifié, de haute technicité, où il devient parfois délicat de se repérer, d’exprimer et de faire comprendre en termes simples les possibilités réellement offertes à l’utilisateur courant, au-delà du discours des professionnels.

2. Mutations et omniprésence des services téléphoniques

Les commutateurs tirent pleinement profit des multiples possibilités de programmation des ordinateurs de commande dont ils ont été dotés à partir des années 1970, et ils offrent de nombreuses variantes d’utilisation nouvelles, en plus des facilités usuelles d’établissement des communications. Ces ressources se conjuguent avec celles de la microélectronique intégrée aux appareils téléphoniques, pour permettre, par exemple:

– d’être averti qu’un appel parvient pendant que l’on est déjà en conversation;

– de connaître le numéro d’annuaire de la ligne d’où provient un appel;

– de transférer une communication avec un correspondant vers un autre poste;

– de réorienter momentanément tous les appels destinés à une ligne vers une autre ligne, de numéro différent;

– d’informer l’utilisateur du coût de la communication en cours, ou bien de celui de l’ensemble des appels demandés pendant une période déterminée;

– de faire prendre en charge la dépense de l’appel par le titulaire de la ligne appelée (procédures du «numéro vert» ou de la «carte pastel»);

– d’utiliser une numérotation abrégée (3 ou 4 chiffres au lieu de 8 ou plus) pour les appels le plus fréquents.

Les commutateurs privés ou les R.N.I.S. offriront des possibilités encore plus nombreuses (cf. chap. 6, Les réseaux ).

Au milieu des années 1990, le taux d’équipement téléphonique dépassait cinquante lignes pour cent habitants en France, où plus de 95 p. 100 des foyers en étaient équipés (notons que ce taux est pratiquement égal à celui des États-Unis). Mais le service téléphonique est également devenu accessible dans les lieux publics, et sur la voie publique, où l’emploi de la télécarte de paiement a permis de prévenir efficacement les actes de malveillance à l’encontre des appareils publics.

Le téléphone est aussi devenu couramment accessible dans les moyens de transport particuliers (radiotéléphone de voiture) et de transport en commun: trains, avions commerciaux (la liaison radioélectrique étant dans ce dernier cas assurée par satellite et non pas par un réseau terrestre).

En Europe, l’adoption d’une norme commune de radiocommunications mobiles numériques (G.S.M., global system for mobiles ) autorise l’emploi du même équipement dans des pays différents. De plus, comme pour le téléphone fixe, les appareils modernes offrent des ressources supplémentaires: accès aux services télématiques – avec un terminal Minitel portable –, à la télécopie et à la communication de données.

Dernière en date des variantes d’accès: le téléphone portable personnel de type Bi-Bop. Techniquement, il s’agit d’un radiotéléphone, mais il ne peut fonctionner que dans le voisinage immédiat (quelques dizaines de mètres) de radioémetteurs («bornes») de faible puissance reliés au réseau téléphonique général. Un premier avantage réside dans le faible encombrement de l’appareil individuel (format de poche), qui se prête ainsi à un usage polyvalent:

– en fournissant le moyen de téléphoner au cours de déplacements (au lieu d’utiliser des appareils publics ou les radiotéléphones de voiture); mais on ne peut être appelé que sous certaines conditions;

– en servant de terminal téléphonique personnel dans les locaux d’une entreprise, une fois ceux-ci équipés d’un radioémetteur du type évoqué ci-dessus, relié au réseau téléphonique interne de celle-ci; ce système de communication personnel est plus efficace que les systèmes antérieurs d’appel de personnes ou de radiomessagerie.

3. Autres modes de communication utilisant l’infrastructure du réseau téléphonique

S’il comporte des limitations pour la transmission des signaux (bande de fréquences transmises limitée à 3 000 hertz environ, bruit de fond, distorsions,etc.), le réseau téléphonique présente l’avantage de sa facilité d’accès et d’utilisation pour les procédés pouvant s’accommoder de ses caractéristiques. Trois d’entre eux sont devenus d’usage courant – la télécopie, le vidéotex et la télématique vocale –, mais certains sont encore peu connus.

La télécopie

En quelques années, la diffusion de la télécopie a dépassé celle du télex (le parc français de télécopieurs, inférieur à 40 000 exemplaires en 1985, en comptait plus d’un million en 1993), en raison d’avantages propres: facilité d’emploi par des personnes non spécialisées, faible coût de transmission d’un document (même coût que celui d’une conversation téléphonique de durée identique), reproduction de l’écriture manuscrite et des dessins, voire des photographies. La qualité de reproduction des documents est en effet en amélioration constante et permet notamment la consultation à distance de services documentaires comportant des images dont la précision est essentielle. La définition obtenue peut atteindre alors un seizième de millimètre, au lieu de un quart de millimètre ordinairement.

La modulation des signaux nécessaires à la télécopie est de type numérique. Or la vitesse de transmission des données sur le réseau téléphonique a progressé de manière sensible, atteignant couramment 9 600 bits par seconde, au lieu de 2 400 quelques années auparavant. La limite théorique se situant au-delà de 20 000 bits par seconde, les améliorations de la qualité des documents transmis par télécopie ne se traduiront pas nécessairement par un allongement des durées de transmission, typiquement inférieures à une minute par page de format courant (A4). C’est a fortiori le cas si l’on utilise un R.N.I.S., dont chaque canal numérique offre un débit de 64 000 bits par seconde.

Le vidéotex

Le terminal à écran et clavier Minitel est bien connu en France, où sa diffusion pourrait atteindre 10 millions d’exemplaires avant la fin des années 1990 (en 1992, le réseau desservait 6 millions de terminaux, pour un trafic annuel de 105 millions d’heures, vers 17 200 codes d’accès); certains pays étrangers ont progressivement adopté des équivalents du Minitel.

L’annuaire électronique public est le plus consulté des services auxquels il permet l’accès, et dont il est devenu impossible de donner une énumération, leur nombre s’exprimant maintenant en dizaines de milliers. On peut toutefois les classer en quelques catégories types:

– les services d’information, y compris de type «presse», accessibles au public, ou de type privé (accès conditionnels par abonnement, codes d’accès, etc.);

– les services de messageries selon divers modes (échanges de messages de personne à personne, diffusion simultanée à des destinataires multiples, ou recueil d’informations ou d’avis émanant d’un grand nombre de personnes, etc.);

– les services transactionnels (réservations de titres de transport, de billets de spectacles, etc.; commandes sur catalogues; opérations de type «banque à domicile», y compris des virement et des versements, etc.);

– des combinaisons des types précédents; au cours de la même communication, par exemple, une transaction peut succéder à une recherche d’information (commande après demande de prix; réservation après obtention de renseignements sur les horaires de transports, etc.);

– des jeux.

La lenteur de la modulation initiale – 1 200 bits par seconde – des signaux du système télétel, réseau du vidéotex de France Télécom, est impropre à la transmission d’images photographiques, sauf si des temps de transmission élevés sont acceptables. L’augmentation de cette vitesse, déjà signalée, conduit cependant à des services vidéotex plus riches et d’un accès plus rapide, grâce à la nouvelle gamme de possibilités fondée sur les performances du R.N.I.S.

La télématique vocale

Au lieu d’accéder à un service par le clavier d’un Minitel, les informations en retour s’affichant sur l’écran, les touches de l’appareil téléphonique permettent la connexion à l’ordinateur contenant les informations recherchées. Celui-ci interprète les demandes préalablement codées par pression sur les touches en question, puis fournit des réponses vocales intelligibles pour le demandeur, par imitation de l’élocution d’une personne.

Dans certaines variantes, les questions peuvent même être formulées verbalement, l’ordinateur étant doté d’une certaine capacité de reconnaissance de la parole humaine.

La téléaction

Pour identifier ou modifier à distance une situation type, parmi un ensemble limité de possibilités, ou détecter l’occurrence d’un événement caractérisable et prévisible, il peut suffire de transmettre très momentanément une quantité relativement faible de signaux. Mais les conséquences éventuelles d’un dysfonctionnement exigent en contrepartie une grande sécurité de la liaison, sa quasi-permanence, et la rapidité de la transmission.

Pour répondre économiquement à ce type de besoin, des équipements permettent aussi d’utiliser les infrastructures du réseau téléphonique sans pour autant nécessiter une liaison téléphonique permanente, ni même perturber les communications téléphoniques sur le trajet qu’elles empruntent, ni mettre en œuvre des liaisons louées fixes. France Télécom a ouvert commercialement un service de ce type en 1990, sous l’appellation Transveil. Ce service permet la surveillance éloignée d’installations à hauts risques ou de systèmes dont les défaillances doivent être immédiatement détectées et éliminées, ou encore la commande à distance d’organes mécaniques, en des lieux non pourvus de personnel permanent, etc.

4. Échanges électroniques de documents. Courrier électronique

Les types de symboles auxquels il est fait appel dans les processus de communication humains sont en nombre restreint, cinq au plus: les symboles sonores (parole), les textes au sens large (ensembles ordonnés de caractères alphanumériques), les images fixes, les images animées (documents de type cinématographique) et les symboles monétaires.

Le texte présente des caractéristiques qui en ont fait un mode privilégié de support des messages: précision de l’expression, permanence, asynchronisme de l’émetteur et du récepteur, facilité de reproduction, économie de moyens techniques, le codage et la transmission se réduisant à ceux d’un nombre restreint de caractères. Il a constitué pendant des siècles, grâce au service postal, le principal moyen de communiquer à distance.

Il demeure essentiel. Mais le support traditionnel en papier présente plusieurs inconvénients; en particulier, il entraîne une difficulté d’accès, du fait de la grande masse de documents disponibles ou créés, et il requiert un transport matériel dont la durée conditionne le rythme des échanges.

En substituant un support électronique au papier, ces inconvénients sont levés, au prix de la nécessité de dispositifs de présentation (imprimante ou écran). La durée du «transport» devient négligeable, l’accès à une masse de documents est facilité. Avantage supplémentaire quand les textes sont enregistrés dans des mémoires électroniques modifiables: si une partie d’un texte doit être modifiée, nul besoin de le récrire entièrement; seuls les éléments à modifier doivent être traités, d’où une meilleure productivité des personnes intervenant pour ces modifications. D’où également le succès croissant du courrier électronique, aux variantes multiples.

Le télex , forme la plus ancienne encore utilisée, présente désormais des inconvénients provoquant un ralentissement de son utilisation: lenteur de la transmission et, surtout, forte limitation dans la variété des caractères utilisables. Répondant néanmoins à une norme mondiale unique, il reste largement utilisé pour les télécommunications internationales.

Le télétex , développé en France et en Allemagne, tendait à supprimer les inconvénients du télex, par un alphabet beaucoup plus riche (308 caractères, soit six fois plus que celui du télex) et une cadence de transmission considérablement accrue (d’un facteur cinquante environ: 2 400 bits au lieu de 50). En contrepartie, il nécessitait un poste de travail réservé à cet usage – une machine à écrire de type particulier –, ce qui en a limité l’intérêt et la diffusion, compte tenu de l’apparition de la micro-informatique à usages polyvalents (cf. chap. 5, Informatique et télécommunications ). En France, le service télétex a été interrompu à la fin de 1992.

Ce procédé n’en offrait pas moins de puissantes ressources de communication pour l’échange de correspondances de type texte: facilité de mise en œuvre, utilisation indifférente du réseau téléphonique ou des réseaux informatiques conformes à la norme X25 du Comité consultatif international télégraphique et téléphonique (C.C.I.T.T.), normalisation internationale, qualité, sécurité, rapidité et faible coût de la transmission.

Avec le télex, la télécopie, le télétex, les messages parviennent à l’équipement terminal du destinataire au moment même de leur émission par celui de l’expéditeur, c’est-à-dire de manière pratiquement instantanée. Une messagerie électronique introduit en revanche un dispositif intermédiaire, dit boîte à lettres, où le message est enregistré et tenu à la disposition du destinataire jusqu’à ce qu’il en prenne connaissance, à l’aide d’un code d’accès assurant qu’il est seul à pouvoir le faire.

Cette organisation présente de nombreux avantages, en particulier la désynchronisation de l’émission et de la réception des messages – l’émetteur peut transmettre des messages au(x) destinataire(s) en l’absence de celui(ceux)-ci –, ainsi que la possibilité d’introduire une «valeur ajoutée» par le système de messagerie, par exemple la transmission d’un même message à plusieurs destinataires désignés par l’émetteur, l’authentification de l’origine du message, la conversion d’un message provenant d’un type d’équipement d’émission pour en permettre la réception sur un équipement d’un type différent (ainsi, d’un Minitel vers un télex, ou d’un télétex vers un télécopieur).

Une norme a été adoptée internationalement pour les messageries (elle porte la référence X400 du C.C.I.T.T.). La conformité à celle-ci assure la possibilité d’effectuer les conversions de codes nécessaires pour permettre les échanges entre terminaux de types différents, et pour interconnecter les messageries entre elles, en vue d’acheminer les messages entre abonnés de messageries différentes, ou raccordés à des réseaux de communication différents, par exemple d’un pays à un autre.

Une messagerie publique de ce type existe en France; elle est commercialisée par la filiale Transpac du groupe France Télécom, sous l’appellation Atlas 400 (fig. 1).

5. Informatique et télécommunications

Du point de vue fonctionnel, un ordinateur n’est pas autre chose qu’un outil capable de traiter des symboles créés par l’homme, selon des règles, variables, définies par l’utilisateur et représentatives de sa propre démarche mentale. Il s’agit donc bien d’une machine à communiquer, en particulier quand les personnes qui entrent les données ne sont pas les mêmes que celles qui exploitent les résultats.

Les ressources de télécommunication répondent aux besoins les plus variés d’échanges de données vers, en provenance, ou entre des ordinateurs. Des techniques spécifiques ont été développées, permettant d’atteindre des vitesses de transmission de plusieurs millions de caractères (octets) par seconde, la plupart des besoins se situant toutefois en deçà de 250 000 caractères par seconde.

Une partie des échanges emprunte des liaisons fixes terrestres, louées aux exploitants de télécommunication, reliant par exemple des établissements éloignés d’une même entreprise. Le coût en étant élevé pour les faibles trafics, il est possible de faire appel aux réseaux publics à commutation Transpac (purement téléinformatique) ou Numéris (R.N.I.S., multiservice), selon les types d’usage.

Bien que la radiotéléphonie soit en principe utilisable pour la téléinformatique, l’emploi optimal de ce type de liaison a conduit à constituer des réseaux radioélectriques réservés aux échanges de données (3RD), en particulier pour des utilisateurs en déplacement.

De ce fait, le choix du moyen de transmission est pour l’utilisateur essentiellement dépendant du coût, car l’informatique possède, à la différence du téléphone, une grande flexibilité à l’égard de la cadence de transmission et du non-synchronisme entre l’émission et la réception.

Micro-ordinateurs et communication

Le micro-ordinateur rassemble les ressources:

– d’un ordinateur proprement dit, avec sa puissance de calcul et de traitement de symboles, sa capacité d’enregistrer des volumes importants de signes (plusieurs dizaines de millions, le plus fréquemment), ses accessoires (matériels et logiciels) nécessaires à la connexion à un réseau de télécommunication;

– d’un terminal informatique connectable à un gros ordinateur, doté de surcroît de mémoire et d’une certaine «intelligence»;

– d’une «super»-machine à écrire, offrant des possibilités de composer, de consulter ou de modifier des documents non seulement textuels alphanumériques, mais également des dessins, des diagrammes, et même des images de type photographique.

Il ne nécessite pas impérativement une imprimante, puisqu’il peut opérer à partir de supports magnétiques, où la densité d’information est très supérieure à celle des supports de papier.

De plus, des techniques permettent de compléter ces ressources par des possibilités audiovisuelles:

– enregistrement et reproduction de brèves séquences sonores (paroles ou toute autre forme de sons) et vidéographiques (images animées);

– codage et décodage pour l’échange instantané de ces types de documents à travers un réseau (numérique) de télécommunication, faisant alors de la machine un terminal téléphonique ou visiophonique.

Cet appareil devient ainsi un terminal universel de communication, soit en temps réel (conversation téléphonique), soit en temps différé (messagerie), soit avec traitement de l’information elle-même (informatique). L’usage des micro-ordinateurs connaît ainsi un fort développement, d’autant que leur prix décroît constamment et que leur commodité est sans cesse améliorée, réduisant l’initiation nécessaire à leur maîtrise et facilitant leur emploi par une population étendue.

Un mode de communication consiste à transporter les supports des documents (par exemple, sous la forme de disquettes) d’une machine vers une ou plusieurs autres.

Depuis le début des années 1980, des réseaux locaux de micro-ordinateurs ont été mis en œuvre, qui permettent la communication entre les machines situées dans un même bâtiment ou établissement, sur des distances maximales de l’ordre d’une centaine de mètres.

La communication à des distances quelconques est aussi devenue possible, y compris entre des pays différents, en empruntant les ressources des réseaux publics et internationaux (liaisons louées, réseaux à commutation de circuits ou de «paquets» de données), dont le choix dépend du type de besoin et du coût.

Des difficultés subsistent encore néanmoins pour l’établissement de communications entre micro-ordinateurs: il s’agit de la non-compatibilité entre machines de conceptions différentes ou entre logiciels d’application ou de communication. Les machines ne «parlent» alors pas la même langue, et la difficulté est multiple: différences de syntaxe, de vocabulaire, de concepts et même d’alphabet.

Des choix d’équipements compatibles permettent cependant la réalisation de vastes ensembles communicants. Par ailleurs, des normes communes se dégagent progressivement, de même que des ressources de «traduction» deviennent disponibles et autorisent des intercommunications de plus en plus aisées entre domaines homogènes différents. La condition pour qu’il y soit fait massivement appel reste la simplicité de mise en œuvre par les utilisateurs, l’idéal étant non seulement qu’il ne soit pas nécessaire pour eux d’être rompus aux techniques de la micro-informatique, mais que ces opérations s’effectuent automatiquement et à leur insu.

Échanges informatiques interentreprises, É.D.I.

Si une entreprise donnée peut assurer l’interopérabilité interne de ses équipements informatiques, il lui est, sauf exception, très difficile d’aménager l’interopérabilité avec les systèmes informatiques des entreprises avec lesquelles elle correspond (fournisseurs, clients, partenaires...). Les échanges de documents avec ces dernières empruntent alors les voies antérieures, principalement de type courrier postal, nécessitant des travaux d’impression, d’expédition et de ressaisie.

Les techniques d’échanges de données informatiques (É.D.I.) offrent des ressources palliant ces inconvénients, en ayant pour objectif l’échange direct d’informations entre des ensembles informatiques initialement non connectables.

L’extrême diversité des systèmes conduit à mettre en œuvre ces techniques essentiellement sous forme d’une «messagerie» normalisée, chaque système n’ayant plus alors qu’à être adapté à celle-ci. C’est l’analogue d’une langue véhiculaire vis-à-vis d’une multiplicité de dialectes vernaculaires.

Le paiement électronique (télépaiement)

Les signes monétaires constituent l’une des cinq catégories de symboles intervenant dans les processus de communication, quand interviennent des échanges de biens ou de services. Ils se prêtent néanmoins, moyennant certaines conditions ou conventions, à une réduction sous forme alphanumérique, propice à des échanges par télécommunication.

De plus, la quasi-totalité des comptes des entreprises et des particuliers sont tenus dans des systèmes informatiques (privés ou bancaires). Le télépaiement n’est donc qu’une variante de procédure transactionnelle téléinformatique. Seules les conditions dont il doit être assorti (absence d’erreurs, identification du payeur, preuve du paiement, résistance à la fraude, etc.) en conditionnent le développement. Ce peut être par exemple l’usage combiné de cartes à mémoire.

Pour les ménages, le Minitel, éventuellement doté d’un lecteur de carte à mémoire (périphérique Lecam), permet d’y faire appel largement pour le règlement d’achats par correspondance, et les services de «banque à domicile» (échanges avec des comptes prédésignés, mouvements de titres d’épargne – désormais entièrement dématérialisés –, par exemple). Le télépaiement devrait être progressivement généralisé pour les opérations les plus courantes (factures de fournitures publiques, en eau, en énergie, en services de télécommunication, paiement des impôts, etc.).

Les professionnels sont équipés de moyens plus spécifiques de télépaiement (réseaux d’ordinateurs, terminaux spécialisés) dans les domaines bancaire et boursier, mais aussi dans celui de la vente au détail.

6. Les réseaux

L’invention de l’appareil téléphonique, attribuée à l’Américain Alexander Graham Bell, occulte en fait une invention d’importance au moins égale: celle du réseau à commutation, permettant de communiquer avec une multiplicité de correspondants en utilisant le même appareil terminal relié au «réseau» en question par une ligne unique. Ce principe du réseau universel a pour effet principal d’abaisser considérablement la dépense moyenne nécessaire, à l’échelle d’une communauté, pour assurer un service de télécommunication.

Ce résultat n’est pas spécifique à ce domaine mais se retrouve dans de nombreuses infrastructures collectives: distribution de fluides, voies de communication, réseaux monétaires, etc. L’usage partagé abaisse le coût au point de changer l’échelle des usages et de permettre un accès massif, bénéfique à la communauté tout entière.

Ainsi s’est développé le réseau téléphonique, où s’est longtemps trouvée absorbée la majeure partie des investissements (plus de 90 p. 100) nécessaires au téléphone. Puis les progrès techniques ont permis d’en diversifier l’emploi: en assurant des services tels que la télécopie ou le vidéotex (Minitel), ce réseau a favorisé un «décollage» beaucoup plus rapide de ces nouveaux modes de communication, grâce à l’économie de l’investissement qu’aurait nécessité la mise en place d’un réseau spécialisé.

Bien que des réseaux réservés à la transmission de données se soient développés parallèlement, on assiste à une imbrication et à une interconnexion croissante de ceux-ci avec le réseau téléphonique. Ce qui offre des possibilités beaucoup plus larges de communication entre des systèmes informatiques de taille moyenne ou petite, et a permis l’émergence de services entièrement nouveaux, qualifiés notamment de «télématiques». Les services accessibles par Minitel font intervenir en effet des interconnexions du réseau téléphonique et du réseau de transmission de données Transpac, la maîtrise technique de ces interconnexions étant décisive pour le résultat.

Les réseaux numériques à intégration de services (R.N.I.S.)

Jusqu’en 1985, le réseau de télécommunication répondait pour l’essentiel aux besoins d’échanges téléphoniques et avait été constitué en conséquence. Fondé sur un principe différent, un R.N.I.S. tend à constituer un réseau d’infrastructure tirant le meilleur parti des équipements de transmission existants (lignes terminales notamment) et de commutation (électronique numérique).

Sous réserve de disposer des équipements terminaux adéquats et de se satisfaire de débits numériques limités à 64 000 bits par seconde, un R.N.I.S. se prête à une infinité d’utilisations possibles pour un coût d’utilisation proche de celui du téléphone. Un tel réseau devient alors l’objet d’une gestion autonome, fonction des demandes de trafics et relativement indépendante des services utilisateurs, en quelque sorte à l’image du réseau routier, dont la gestion répond à un ensemble de besoins très divers en dimensions, poids, vitesses et distances pour les véhicules qui l’empruntent.

Avec le R.N.I.S., la technique numérique est étendue à la «ligne téléphonique» qui relie le commutateur public, déjà numérisé, à l’installation terminale de l’utilisateur. Mais le R.N.I.S. ne constitue pas seulement une nouvelle variante du service téléphonique, car il offre aussi d’autres avantages. Dans le cas d’une conversation téléphonique, il transmet des signaux numériques représentatifs de nombres associés aux variations d’une pression acoustique sur le microphone. De tels signaux peuvent aussi représenter des données alphanumériques échangées entre des équipements informatiques ou provenir du codage d’autres types de symboles comme des textes, des dessins et même des images. Ce réseau permet donc à lui seul, moyennant l’existence de terminaux adaptés, des modes de communication diversifiés. Il est ainsi apte à constituer des liaisons informatiques entre ordinateurs, liaisons qui sont commutables.

Dans les réseaux analogiques, les signaux nécessaires à la commande des commutateurs (numérotage, sonnerie du demandé, déconnexion, etc.) sont d’une nature radicalement différente des signaux représentatifs de la parole transmise. En revanche, dans le R.N.I.S., une partie des liaisons numériques accessibles à l’utilisateur est réservée pour l’échange de signaux de commande et d’informations avec le système de télécommunications lui-même, dans la limite de deux mille caractères alphanumériques par seconde dans chaque sens. Cela permet, d’une part, un enrichissement considérable, quasi illimité, du «dialogue» avec le système, par rapport au téléphone simple par exemple, d’autre part, la mise en œuvre d’une gamme très étendue de nouvelles utilisations du réseau. C’est ce qui rend possible, en outre, d’exploiter la même ligne pour plusieurs types de terminaux correspondant à des modes de communication distincts (fig. 2).

Les différents modes de communication et les usages

De fait, Numéris est un sous-ensemble de la partie déjà numérisée du réseau téléphonique. L’utilisateur (abonné) peut donc obtenir toute communication désirée avec tout autre utilisateur d’une ligne téléphonique, appartenant ou non à ce réseau, y compris à l’étranger. Les services de télématique (Minitel), de télécopie ou de transmission de données par modem à débit inférieur à 10 000 bits par seconde peuvent aussi emprunter le réseau Numéris.

La possibilité d’une communication numérique à haut débit de bout en bout permet d’autres types d’échanges qui nécessitaient auparavant des moyens beaucoup plus coûteux (lignes spécialisées numériques):

– acheminement instantané de gros volumes de données informatiques (quelques millions de caractères alphanumériques);

– télécopie à haute définition, de grande qualité et de grande rapidité;

– transmission d’images photographiques préalablement codées numériquement;

– échanges d’images animées (vidéo) de qualité sommaire;

– échanges brefs, en mode transactionnel, de données informatiques;

– communications téléphoniques d’une qualité proche de la haute fidélité si l’on dispose d’appareils terminaux spécialement conçus;

– échanges «multimédias» qui font intervenir simultanément le son, les données, les textes, la télécopie, les images fixes ou animées (une des possibilités étant la communication visiophonique).

Le R.N.I.S. met aussi en œuvre de nouveaux services qui complètent ceux de la ligne téléphonique existante:

– aiguillage d’un appel vers un poste particulier (ou un terminal) d’une installation qui en comporte plusieurs associés au même accès à Numéris: il s’agit de la sélection directe à l’arrivée;

– possibilité de connaître le coût d’une communication en cours ou à l’issue de celle-ci;

– information d’un nouvel appel pendant une conversation et possibilité d’y répondre sans mettre un terme à la communication en cours mais en la suspendant;

– possibilité de réorienter les appels vers un autre usager du réseau;

– information sur l’origine d’un appel arrivant, par affichage du numéro de la ligne appelante (sous certaines conditions réglementaires seulement);

– déplacement physique de l’équipement terminal (changement de prise) sans coupure de la communication après la déconnexion et la reconnexion de l’appareil.

Toutes ces facilités nécessitent par ailleurs une nouvelle présentation des appareils téléphoniques, qui comportent de nombreuses touches de commande et des moyens de visualisation des informations.

L’équipement à usage purement téléphonique restant encore d’un coût élevé, les premiers usages du R.N.I.S. s’orientent donc plutôt vers les nouveaux modes de communication. Les plus utilisés sont les échanges d’images, la consultation à distance de documentations à partir de base de données télématiques, les échanges transactionnels de monétique, les réunions à distance, la télécopie, l’interconnexion d’ordinateurs et les échanges de données informatiques. Dans ce type d’utilisation, les terminaux sont reliés directement aux terminaisons numériques de réseau (fig. 2).

Une deuxième catégorie d’usages est liée à l’existence de commutateurs numériques privés multiservices, qui peuvent, depuis 1990, être connectés au réseau Numéris (fig. 3).

Un troisième type d’utilisation, qui se dessine depuis 1990, est lié à la refonte progressive de l’architecture des réseaux de communication dans les organismes ou les entreprises multiétablissements. Elle est suscitée par la possibilité d’intégrer voix, données et bureautique sur des supports polyvalents et complémentaires – dont le R.N.I.S. est l’un des principaux –, choisis en fonction des besoins caractéristiques en trafic; cette intégration ainsi que la richesse des moyens disponibles pour gérer ces nouveaux réseaux conduisent à un optimum économique et à des services plus nombreux et de meilleure qualité. Cela nécessité toutefois un important travail de conception préalable, une coopération entre les responsables de l’informatique et de la téléphonie, ainsi qu’une connaissance fine des flux de communication de toute sorte et des moyens techniques permettant d’y répondre. Il s’agit là de compétences nouvelles et coûteuses que seules, pour l’instant, les grandes entreprises peuvent cultiver en leur sein. Ces compétences peuvent aussi devenir le propre de nouvelles professions (conseil et ingénierie en informatique).

Le R.N.I.S. n’est toutefois pas réservé aux entreprises de grande taille. Ses caractéristiques et son coût d’utilisation offrent aussi des ressources nouvelles pour les petites et moyennes entreprises. Les travailleurs indépendants et les professions libérales dotés de moyens informatiques constituent la clientèle potentielle la plus nombreuse du réseau Numéris. De plus, à l’avenir, il est fort probable que le coût de certains services de ce réseau sera abordable pour les particuliers; il pourra ainsi être utilisé par tout public. Le visiophone, par exemple, pourrait en apporter l’illustration.

Les données techniques du R.N.I.S.

Les principes de réalisation d’un réseau R.N.I.S. interviennent sur les installations terminales, sur les lignes de raccordement au commutateur public et sur le réseau général.

Pour les installations terminales , la figure 2 montre comment se traduit en pratique l’intégration des services de communication utilisés.

La constitution des lignes de raccordement au commutateur public ne diffère pas de celles du réseau téléphonique (câbles, supports aériens et conduits souterrains, équipements de connexion), mais le R.N.I.S. exige des dispositifs de transmission numériques spéciaux à chaque extrémité de la ligne: d’une part, dans le commutateur public, où ce rôle est réservé à des concentrateurs satellites numériques, d’autre part, au domicile de l’utilisateur avec la terminaison numérique de réseau.

Le réseau général (commutateurs et circuits d’interconnexion) présente une architecture à deux niveaux (fig. 4):

– le réseau de transmission proprement dit, dans lequel Numéris utilise exclusivement la portion numérisée;

– le réseau sémaphore, distinct et superposé au premier, qui est conforme au système C.C.I.T.T. no 7, pour l’échange des signaux nécessaires à l’exploitation du réseau de transmission.

Ce type d’organisation permet certaines améliorations importantes, telles que la rapidité d’établissement des communications qui se réduit à 2 secondes au lieu de 20 secondes.

Le R.N.I.S. offre à chacun de ses accès (interface S) des liaisons numériques bidirectionnelles commutées indépendantes, d’un débit binaire de 64 000 bits par seconde, qui sont les canaux B.

Pour une communication, un canal B peut être exploité soit en mode «transparent», où la séquence numérique est fidèlement transmise de bout en bout, soit en mode «non transparent», si le besoin est limité à la restitution d’un signal analogique pouvant éventuellement être décodé puis recodé en des points intermédiaires de la liaison (par exemple pour le téléphone).

Le dialogue utilisateur-réseau emprunte une liaison fonctionnellement distincte, utilisant le même support physique, le canal D, dont le débit peut atteindre 16 000 ou 64 000 bits par seconde. En France, ce canal permet l’échange de données avec des correspondants dans les versions évoluées du R.N.I.S., par l’intermédiaire du réseau national Transpac.

En pratique, sur un raccordement physique correspondant à une ligne d’abonnement à laquelle est associée une interface S, l’utilisateur accède soit à deux canaux B, utilisables indépendamment, et au canal D associé (à 16 kbit/s), soit 2 B + D (144 kbit/s) dans le cas de l’accès «de base», soit à un nombre de canaux B compris entre 15 et 30, dont la mise en œuvre s’effectue par un canal D à 64 000 bits par seconde, soit au maximum 30 B + D (2 Mbit/s) dans le cas de l’accès «primaire».

Développement en France

S’appuyant sur la numérisation précoce de son réseau téléphonique et de ses sources industrielles, la France a été, peu avant 1980, parmi les premiers pays à promouvoir les concepts du R.N.I.S. Après une période de mise au point en laboratoire, une commercialisation expérimentale du R.N.I.S. est engagée dans la région de Saint-Brieuc entre 1983 et 1987. Les résultats satisfaisants ont permis l’ouverture commerciale effective d’un véritable R.N.I.S., à Saint-Brieuc dès la fin de 1987, puis à Rennes et à Paris en 1988. Elle a été étendue en 1989 aux principales métropoles nationales (Lille, Lyon, Marseille) et à la banlieue parisienne, l’accès primaire devenant disponible la même année, sous l’appellation commerciale Numéris. La couverture totale du territoire national a été achevée à la fin de 1990.

Le nombre de raccordements estimé en accès de base (2 B + D) approchait cinq mille à la fin de 1990. On estime qu’il dépassera le million avant l’an 2000. À cette date, la baisse du prix de certains services permettra un développement d’usages de Numéris par le grand public, laissant augurer plusieurs millions de raccordements en perspective, sans aller jusqu’à une substitution complète du téléphone courant (28 millions de lignes en 1990).

Développement international

Malgré la diversité des situations et des approches, la plupart des pays occidentaux européens ont entrepris de faire évoluer leurs réseaux de télécommunication pour y inclure un R.N.I.S. public.

Certains ont ouvert des réseaux expérimentaux: la république fédérale d’Allemagne et les Pays-Bas en 1988, le Royaume-Uni avec le réseau I.D.A. depuis 1985, par exemple. L’ouverture commerciale partielle ou totale a été effective avant la fin de 1990 en république fédérale d’Allemagne, en Belgique et dans le Royaume-Uni. Elle est en cours pour l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas et le Danemark.

La situation européenne est marquée par une forte volonté internationale de cohérence et d’interfonctionnement:

– coopération de prénormalisation et de programmation au sein d’une association quadripartite (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie);

– signature d’un protocole commun d’intention (Memory of Understanding en 1989) par une forte majorité des administrations et des compagnies de télécommunications des vingt-six pays qui constituent la Conférence européenne des postes et télécommunications (C.E.P.T.) – ce document manifestait la volonté partagée de rendre accessible, dans chaque pays, un R.N.I.S. public conforme aux normes du C.C.I.T.T. et de la C.E.P.T., avant la fin de 1993;

– volonté et action de la commission européenne pour constituer un R.N.I.S. «paneuropéen», instrument de compétitivité économique et d’ouverture du marché des services et des équipements de télécommunication, grâce à l’interconnexion des R.N.I.S. nationaux.

Ces actions se conjuguent avec la création en 1988 de l’E.T.S.I. (European Telecom Standard Institute), institut international doté d’experts permanents pour la préparation des normes européennes dans le domaine des télécommunications.

Toutes ces diverses dispositions visent à l’interchangeabilité des équipements terminaux et l’élargissement maximal des caractéristiques fonctionnelles communes pour le bénéfice des communications internationales en R.N.I.S.

En Amérique du Nord, la déréglementation de 1984 a conduit à un développement de multiples R.N.I.S. qui n’offrent, sauf exception, que les ressources du service téléphonique courant. Les matériels, de provenance industrielle différente, ne sont pas interchangeables, et les normes techniques des différents réseaux possèdent des variations notables. Il existe aussi une vive concurrence de réseaux privés «sur mesure», plus rapidement disponibles, pour les grandes compagnies ayant des établissements dans plusieurs États. Le développement important du service Centrex – qui est le partage de commutateurs privés entre plusieurs entreprises géographiquement concentrées– a été un facteur d’accélération local de développement du R.N.I.S. en raison des compléments de service pour la téléphonie. De ce fait, les États-Unis ont une avance importante sur l’Europe pour le nombre d’utilisateurs raccordés, qui était proche de cent mille dès 1990. Par ailleurs, sous la pression de la clientèle et celle d’institutions diverses, de nombreux efforts sont en cours en vue d’unifier la situation et de permettre la constitution d’un réseau unique.

Au Japon, un réseau numérique commuté non R.N.I.S. a été ouvert au public dès 1985 (I.N.S. Net), le R.N.I.S. proprement dit étant commercialisé depuis 1988 pour l’accès de base, et 1989 pour l’accès primaire. Certains pays tels que Singapour, Hong Kong et l’Australie ont développé des R.N.I.S. nationaux. Ces derniers tendent à se conformer à la normalisation internationale du C.C.I.T.T., permettant ainsi d’établir dans un proche avenir des liaisons internationales.

Prolongement technique d’un réseau téléphonique moderne, Numéris constitue aussi un facteur de profonde transformation du paysage des télécommunications, en milieu professionnel d’abord, puis pour le public en général. Il fait du réseau une entité technique polyvalente, autorisant des variations à l’infini des procédés de télécommunication, dans des limites uniquement imposées par des caractéristiques technologiques (64 000 bits par seconde et par liaison). Les possibilités qu’il offre n’étaient pas entièrement inconnues auparavant, mais nécessitaient des réalisations limitées et coûteuses. Le propre de Numéris et des R.N.I.S. est de les rendre accessibles à une très grande échelle et dans des conditions économiques les mettant à la portée du plus grand nombre, des professionnels d’abord, puis des particuliers.

Évolution

Le réseau principal (public) comporte deux parties distinctes du point de vue de leur fonction et de leur technologie:

– la partie lignes de raccordement des usagers (particuliers, entreprises), composée de plusieurs dizaines de millions de liaisons en paires symétriques de fils de cuivre, autorisant des débits de quelques centaines de milliers de bits par seconde, pouvant dans certains cas atteindre 2 millions de bits par seconde, ce qui est suffisant pour une majorité d’usages;

– la partie dorsale commune , où le nombre de liaisons est environ dix fois moindre, mais où les débits unitaires atteignent plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de millions de bits par seconde; on fait alors principalement appel à la transmission par fibres optiques et, dans une moindre proportion, aux faisceaux hertziens en hyperfréquences (plusieurs gigahertz).

Si besoin est, des raccordements à cette partie dorsale utilisant les fibres optiques peuvent répondre aux besoins exceptionnels de transmission de certains organismes. Des réalisations de ce type permettent par exemple l’établissement de liaisons à très hauts débits – supérieurs à 30 millions de bits par seconde – entre les systèmes informatiques de grands centres de recherche répartis sur le territoire national.

Malgré de nombreux avantages, le coût de cette technique ne permet cependant pas d’envisager sa généralisation aux raccordements d’abonnés avant la fin des années 1990.

7. Spécificité des besoins professionnels

Bien qu’avec des variantes, le seul service de télécommunication donnant lieu à un usage résidentiel massif demeure le téléphone. Une partie importante du trafic résidentiel est déjà échangée avec des entreprises, des organisations et des administrations.

En fait, l’activité économique est à l’origine d’un part essentielle de l’usage des ressources de télécommunication. Divers éléments contribuent à l’intensité de cette «consommation»:

– rapidité et interactivité en ce qui concerne les échanges commerciaux;

– apports différenciés de procédés particuliers de communication dans certains domaines (échanges de données dans l’activité bancaire, échanges d’images dans le milieu industriel ou médical, transmission de textes dans la presse, etc.);

– intensité de la communication au sein même de l’entreprise, pour la coordination des activités individuelles ou d’équipes géographiquement éloignées, voire dispersées dans des pays différents (internationalisation des firmes et des débouchés commerciaux);

– utilisation massive de l’informatique.

Les télécommunications d’entreprise constituent, en fait, le domaine privilégié pour la mise en œuvre des procédés les plus variés et les plus sophistiqués:

– téléphonie enrichie par les fonctions utilisables des commutateurs privés (accès direct sans passer par un opérateur, communications simultanées, messageries vocales, annuaire électronique interne, numérotation abrégée, conférence téléphonique, etc.);

– échanges de données informatiques et appel à des services télématiques professionnels (banques de données);

– échanges de documents (textes, images, vidéogrammes), combinant télécopie, messageries, liaisons entre micro-ordinateurs, systèmes de gestion et d’archivage de documents;

– réalisation de «téléréunions», soit par liaisons téléphoniques multiples et simultanées, soit en transmettant aussi l’image des participants (visioconférences);

– maintien de liaisons avec des collaborateurs en déplacement et localisation géographique éventuelle de ceux-ci (flottes de véhicules, navires, par exemple).

De fait, l’importance prise par les moyens de télécommunication et leur coût élevé conduisent à concevoir leur organisation en réseau(x) d’entreprise assurant l’efficacité, la commodité et la sûreté d’emploi des divers moyens, en cherchant à minimiser les dépenses correspondantes. En raison du recours abondant aux services et infrastructures publics, ces réseaux d’entreprise demeurent en partie virtuels. Certaines techniques de liaisons par satellites (V.S.A.T., very small aperture terminal ) permettent toutefois de s’affranchir de plus en plus des infrastructures en question.

Certaines entreprises ou organisations vont jusqu’à constituer et former un personnel spécialisé pour concevoir, organiser et gérer les moyens de télécommunication propres à l’entreprise, ainsi que pour assurer les relations avec les prestataires professionnels publics et privés.

8. Évolution des services résidentiels

Les services utilisés à titre résidentiel connaissent à leur tour une rapide et spectaculaire diversification dans diverses directions:

– la télématique vocale ; par rapport aux services vidéotex, le dialogue avec un ordinateur éloigné s’effectue au moyen d’un appareil téléphonique ordinaire (grâce à son clavier), nettement plus répandu – plus de 30 millions d’exemplaires en France au milieu des années 1990 – que les Minitels, cinq fois moins nombreux;

– le vidéotex multimédia repose sur une télématique enrichie par des images de type photographique ou par des messages sonores reçus par l’intermédiaire du même canal que les informations affichées sur l’écran du terminal;

– pour la visiophonie , le terminal téléphonique comporte un écran affichant l’image (animée) des correspondants pendant les communications; le développement d’un tel service est essentiellement dépendant du coût de fabrication des terminaux.

Comportant un écran et des ressources de communication téléphonique auxquelles s’ajoutent des mémoires, des moyens de composer, d’émettre ou de recevoir, de consulter et de modifier des messages complexes, mais aussi utilisable à l’occasion comme un simple Minitel, le micro-ordinateur devient le support de la micro-informatique communiquante, en se transformant en terminal universel de communication à domicile, de même qu’il tend à le devenir en milieu professionnel.

Le développement de son emploi est tributaire d’un faisceau de facteurs incluant la tarification, les services disponibles (correspondance avec les entreprises, banques, commerces, services publics, etc.)... et un certain volontarisme de la part des différents acteurs.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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